XXIII
On est en route depuis trois jours.
Au lever du soleil, tout est noyé dans uneéclatante nuance d’or.
Et, en se levant, le soleil de cette quatrièmejournée éclaire dans l’est une grande ligne verte – d’abord d’unvert tout doré aussi, puis d’un vert si invraisemblable et si vert,qu’on la dirait tracée avec une peinture chinoise, avec une fine etprécieuse couleur d’éventail.
Cette ligne, c’est la côte de Guinée.
On est arrivé à l’embouchure du Diakhallémé,et le navire qui porte les spahis se dirige vers l’entrée large dufleuve.
Le pays est là aussi plat qu’au Sénégal, maisla nature est différente : c’est déjà la région où lesfeuilles ne tombent plus.
Partout une verdure surprenante, une verduredéjà équatoriale, d’une jeunesse éternelle, celle-là, et d’un vertd’émeraude, d’un de ces verts que nos arbres n’atteignent jamais,même dans la splendeur de nos mois de juin.
A perte de vue, ce n’est qu’une même forêtsans fin, d’une platitude uniforme, se mirant dans l’eau inerte etchaude, – une forêt malsaine, au sol humide, où les reptilesfourmillent.