XI
« Ah ! que cette journée passelentement ! Il est des minutes où je me sens lâche… jevoudrais crier. Eh bien ! non, je ne crierai pas, je nepleurerai pas… Que d’autres enfoncent dans leur poitrine leursongles qui s’ensanglantent : moi, je veux être le Spartiatedont le renard dévorait les entrailles… je compte ses griffes quifouillent dans mes viscères… et je ris ! oui, sur mon âme, jeris, heureux de l’effroyabilité de ma souffrance. Tantmieux, par l’enfer ! Crispe-toi dans les angoisses, ô monâme ! Chacun de ces plis, sillons creusés par la douleur,restera comme une ligne de plus au livre des souvenirs !… Etquels souvenirs !
« Nage dans cet océan de désespoir.N’oublie rien. Songe à ces serrements de main, songe à ces regardséchangés, songe à son espoir à lui, à sa craintepudique à elle… songe… mais songes-y bien… que dans quelques heuresla nuit viendra… tu sais ce que cela signifie, mon âme. Repais-toide cette attente… prépare-toi… car je ne te ferai pas grâce d’unseul de leurs baisers…