C’était écrit

Chapitre 54

 

« Où est lord Harry ? demande Irisau survenant.

– C’est à moi qu’il incombe de vousapprendre, milady, ce qu’il n’a pas eu le courage de vous direlui-même.

– Permettez, je ne comprends pas !riposta lady Harry intriguée.

– Vous regardiez là une pauvre plantedélicate, reprit le docteur, vous demandant comment la fairevivre ; l’intérêt que vous témoignez à tout ce qui souffre surla terre, milady, excite ma curiosité et ma sympathie ; jeveux vous faire savoir que, moi aussi, j’ai entrepris de disputerune plante délicate à la mort ! Inversement à vous, j’exercemon jardinage en chambre. Or c’est un spectacle qu’il est bond’épargner à une jeune femme comme vous. Pardonnez ma franchise,mais je suis un saint Jean bouche d’or ! lord Harry a trouvébon de temporiser, de mettre des mitaines et d’attendre ; lemieux, voyez-vous, c’est d’arriver au fait.

– Que prétendez-vous dire ? demandaIris.

– Moi, je n’y vais pas par quatrechemins. Lord Harry devait vous prier de faire vos préparatifs dedépart ?

– Mais de quel droit vous ingérez-vousdans nos affaires ? s’écria lady Harry avec une sorted’emportement. Voilà une impertinence dont j’ai le droit d’êtrefâchée !

– Oserais-je vous rappeler que la colèreest mauvaise conseillère.

– C’est inutile », répondit Irispiquée.

Le docteur va-t-il donc me prendre pourconfidente ? pensait-elle ; or elle le connaissait tropbien, en réalité, pour croire que cela fût possible. Elleajouta :

« Mais enfin, quel sujet d’inquiétudepuis-je avoir ? Pourquoi m’éloignerais-je ?

– Mon Dieu ! fit M. Vimpany,sur ce petit théâtre du monde, notre vie n’est qu’une lutte et,dans cette lutte, l’homme que j’ai la prétention de sauver peutfort bien, malgré tous mes efforts, être le vaincu. Une mort lenteest ce qu’il y a de plus triste au monde, si le patient s’acharne àvivre, il peut prendre son lit en horreur et alors il suffit d’unmoment où l’on a le dos tourné, pour qu’il descende dans le jardin,criant, toussant ;… de pareilles scènes pourraient avoir undéplorable effet sur votre santé, sur votre système nerveux, et àvotre place je partirais sur-le-champ.

– Je vous interdis, monsieur, de medonner un conseil, dit-elle en se redressant de toute sahauteur.

– Loin de moi la pensée de donner unconseil à milady, mais…

– C’est assez, vous dis-je.

– Un mot encore… Lord Harry m’a informéque Hugues Montjoie est en voie de guérison. En mettant, l’autrejour, un timbre sur une lettre de vous, j’ai appris que vous êtesen correspondance. Eh bien ! pourquoi n’iriez-vous pas àLondres suivre et hâter les progrès de la convalescence d’unami ? Harry,… pardon, lord Harry, ne le trouverait pasmauvais, j’en suis convaincu. Pour vous,… pour lui… cela serait lameilleure des combinaisons. Dès que les circonstances lepermettront, lord Harry vous priera de réintégrer le domicileconjugal. Ne me ferez-vous pas l’honneur d’un mot deréponse ?

– J’en chargerai mon mari. »

Après quoi, lady Harry tourne le dos à soninterlocuteur, et cherche lord Harry dans toutes les pièces de lamaison, mais en vain. De propos délibéré, il était sorti pourl’éviter. Elle comprit que tous les deux, ligués contre elle,jouaient le même jeu. À ce moment, prise de spasme, sans courage,sans forces, elle tombe en syncope.

Après un laps de temps dont elle est incapablede mesurer la durée, la porte s’ouvre doucement. Son mari pris depitié pour elle serait-il revenu ?

« Entrez, dit-elle vivement,entrez. »

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