Borgia !

Chapitre 70NAVIRE EN VUE

Depuis le moment où Giacomo était parti, le chevalier, assis surune pierre de la grève, avait attendu le jour. L’aube se levaenfin.

Ragastens, les yeux fixes et vides, regardait sans voir. Sessouvenirs se levaient l’un après l’autre et tout cela aboutissait àla vision d’une jeune fille habillée de blanc, lancée au galop d’uncheval fougueux, et venant se ranger près de lui pours’écrier :

– Monsieur, qui que vous soyez, protégez-moi, délivrez-moide cet homme !…

Les heures tombaient lentement… Le soir vint. Ragastens était àla même place. Tout à coup, une voix l’arracha violemment à sarêverie suprême.

– Vous regardez la voile qui monte là-bas, àl’horizon ?…

Ragastens fut sur pied d’un bond. Il regarda l’homme qui venaitde lui poser cette question indifférente. Il reconnut lepêcheur, son hôte. Ragastens le saisit violemment par le bras qu’ilsecoua.

– Que dis-tu ? gronda-t-il. Une voile quivient ?… C’est lui, n’est-ce pas ! C’estlui !…

Le pêcheur, stupéfait, recula et il reprit son examen de lamer.

– Voyez-vous, dit le pêcheur, il a le cap droit surCaprera… Le diable me damne si ce bateau-là ne vient pas d’Ostie…Tenez ! Vous devez le voir, maintenant !…

Ragastens détourna la tête. Qu’importait qu’il vit ou qu’il nevit pas. Ce navire venait d’Ostie ! Il piquait surCaprera !… C’était tout ce qu’il avait besoin de savoir :c’était César !…

– C’est une goélette de grande allure, dit tranquillementle pêcheur.

– Dans combien de temps pensez-vous qu’elle arriveraici ?

– Dans les conditions où ils naviguent, ces gens peuventaborder ce soir vers dix heures… Mais je ne sais pourquoi ils n’ontpas tendu toute leur toile… Ils ont peut-être intérêt à n’aborderqu’assez tard… S’ils continuent ainsi, ils ne seront pas à Capreraavant minuit.

Le pêcheur souhaita le bonsoir à son hôte et se retira.Ragastens demeura les yeux fixés sur le navire. Mais bientôt, lanuit se fit et Ragastens ne vit plus rien…

– Monsieur, il est neuf heures ! murmura tout à coupSpadacape près de lui.

Ragastens parut se réveiller d’un long cauchemar.

– Allons ! dit-il simplement.

 

Lorsque la goélette fut en vue de Caprera, César ordonna dediminuer l’allure du navire. Il ne voulait débarquer qu’à lanuit.

Vers dix heures, César Borgia sautait sur le rivage et renvoyaitle canot qui l’avait amené. Il était seul. Il se mit à courir versla porte du château en contournant les murs. Un quart d’heure plustard, il était en présence de Lucrèce.

– Enfin ! Toi !… s’écria celle-ci.

– Elle est là ?

– Tu vas la voir, dit Lucrèce, viens !

– Pourquoi trembles-tu ?

Lucrèce saisit la main de César et l’entraîna rapidement àtravers des couloirs. Devant une porte, elle s’arrêta, haletante etprononça ceci :

– Elle est là. Si elle te résiste, tue-la. Si tu ne la tuespas, je la tue !… Va !…

Auteurs::

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer