9 – Le bouvreuil et le corbeau
Un bouvreuil, un corbeau, chacundans une cage,
Habitaient le même logis.
L’un enchantait par sonramage
la femme, le mari, les gens, toutle ménage :
l’autre les fatiguait sans cessede ses cris ;
il demandait du pain, du rôti, dufromage,
qu’on se pressait de luiporter,
afin qu’il voulût bien setaire.
Le timide bouvreuil ne faisaitque chanter,
et ne demandait rien :aussi, pour l’ordinaire,
on l’oubliait ; le pauvreoiseau
Manquait souvent de grain etd’eau.
Ceux qui louaient le plus de sonchant l’harmonie
n’auraient pas fait le moindrepas
pour voir si l’auge étaitremplie.
Ils l’aimaient bien pourtant,mais ils n’y pensaient pas.
Un jour on le trouva mort de faimdans sa cage.
Ah ! Quel malheur !Dit-on : las ! Il chantait si bien !
De quoi donc est-il mort ?Certes, c’est grand dommage !
Le corbeau crie encore et nemanque de rien.