Chapitre 77VENT D’ESPOIR
Comme minuit sonnait à l’église Notre-Dame deschamps, c’est à dire au moment précis où Isaac Laquedem, vivantepénitence de dix-huit siècles, exterminait le monstre qui avait étéle soldat Ozer, image honteuse et dégradée du crime sans repentir,la comtesse Louise sentit qu’un poids était retiré de dessus soncœur.
Elle était là, au chevet du vicomte Paulendormi. Le vicomte Paul eut un sourire. Sa main pâle était entreles mains de cette belle jeune fille blanche et douce quiressemblait à la petite Lotte.
Dans la chambre voisine, Fanchon la nourriceet le bon abbé Romorantin causaient de choses surprenantes. L’abbéRomorantin apprenait à Fanchon que la fille d’Ahasvérus étaitdouble… vous lisez bien : double, et ce n’est pas plusincroyable que le reste de cette histoire.
On eût dit que cette main blanche qui touchaitla main du vicomte Paul parsemait son sommeil de rêves heureux.
La comtesse Louise les regardait tour à tour,son souvenir remontait les pentes du passé. Elle s’étonnait de n’yplus trouver de larmes.
Quelques instants après minuit, les lèvres dela belle jeune fille s’entr’ouvrirent pour laisser tomber ces mots,suspendus comme des perles à son sourire :
– Mon père va venir.
En même temps, un pas sonore attaqua le pavéde la rue. La comtesse Louise se mit à la fenêtre et vit un hommede haute taille qui marchait dans l’ombre, appuyé sur un longbâton. Le vent qui faisait flotter les cheveux de cet hommeapportait comme un parfum d’espérance…
Quand Louise referma la croisée, le vicomtePaul était éveillé. Il dit :
– Mère, j’ai rêvé que mon pèrem’embrassait, mon père d’autrefois, mon vrai père !