Chapitre 78LE VOYAGE
Nous sommes sur la route de Flandres. L’Hommeallait à larges enjambées ; la lune éclairait sa taille droiteet robuste. Le souffle sortait puissant de sa poitrine.
Déjà, derrière lui, Paris perdait dans la nuitses gigantesques perspectives, – Paris changé en bivac et quidormait le sommeil fiévreux de la guerre civile.
L’homme se retourna, au sommet des coteaux deLivry. Son œil voyait plus loin et mieux que celui des autreshommes, car il distingua, malgré la distance, un vieillard quiveillait, pensif et seul, à la lueur d’une lampe, dans une chambredu palais des Tuileries. Ce palais a vu beaucoup de semblablesveilles.
Le vieillard était un roi.
– Marche ! marche ! murmural’Homme. Fais comme moi, siècle inquiet, peuple vaillant, humanitémalade ! marche ! marche ! marche !
Il reprit sa route silencieuse et rapide. Lesarbres fuyaient derrière lui ; les clochers lointainsgrandissaient, puis passaient.
Auprès de lui glissait une forme blanche quine le quittait pas plus que son ombre.
Quand le crépuscule naquit, une vaste forêtdrapait autour de lui les plans inclinés d’une chaîne de montagnes.Il avait franchi la frontière de France, c’était la terre allemandequi l’entourait.