La Fille du Juif-Errant

Chapitre 48L’AVEU

Elle se pencha pour mettre un long baiser surce front doux comme celui d’une jeune fille.

– Mère, dit Paul, si je ne t’aimais passi bien, je mourrais. Je suis toujours seul. Je fuis ceux de monâge pour ne pas entendre ce qu’ils disent, car ils disent souventdu mal de celui dont tu portes le nom et que j’appelais mon père.Les pauvres amis qui nous sont restés fidèles essayent bien de meconsoler avec d’étranges fables et des contes d’enfants ; maisje ne suis plus un enfant, ma mère, et je ne crois plus ce que jene comprends pas.

– C’est vrai, murmura la comtesse Louise,tu es un savant maintenant, mon Paul chéri. Tu es bien plus savantque l’abbé Romorantin qui croit encore à mon bonheur passé, à latendresse, à la bonté du comte Roland de Savray, mon mari bienaimé… Ah ! si tu pouvais te souvenir !…

– Je ne me souviens que trop !murmura Paul en une sorte de gémissement.

La comtesse ne l’entendit pas etpoursuivit :

– Si tu savais comme moi quel cœurc’était que ton père ! combien de délicatesse et de bellefierté ! que d’amour ! que d’honneur !…

– Je crois à cela, ma mère interrompit levicomte Paul dont les yeux étaient mouillés de larmes. Je crois àcela comme je crois en Dieu !

– À quoi donc ne crois-tu pas, monchéri ? demanda la comtesse Louise.

Paul resta un instant silencieux, puis il secouvrit le visage de ses mains.

– Il y a des choses qui sontimpossibles ! murmura-t-il enfin avec découragement. Ilfaudrait croire aussi à Barbe-Bleue, à Croquemitaine, à l’Ogre, auPetit-Poucet… tandis qu’il y a bien des exemples, ma mère, bien desexemples avérés d’hommes au cœur bon, loyal, chevaleresque même,qui tombèrent tout d’un coup au plus profond de l’abîme dumal !

– Enfant, dit la comtesse avec unefermeté douce, si je me trompe, laisse-moi mon erreur. Je veux bienmourir, mais que ce ne soit pas par toi !

Paul s’agenouilla, dévorant de baisers lespauvres belles mains froides de la comtesse Louise.

– Oh ! mère ! mère !reprit-il d’une voix où les larmes contenues tremblaient, jecroirai à tout ce que tu voudras… Mais tu m’as arraché la promessede ne jamais risquer dans un duel ma vie qui est à toi…

– Qui est à Dieu ! rectifia lapauvre mère.

– On m’a insulté…

– Déjà !

– Rends-moi ma promesse, mamère !

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