Chapitre 23L’HISTOIRE
– Pour le coup, s’écria ici le docteurLunat, l’ange va se fâcher. Je le connais, il ne plaisante pasquand il est en colère.
Et il partit comme un trait, caressant sabarbe absente et s’appuyant sur son bâton imaginaire.
– Il a guéri un notaire ! murmura lecommandant de la gendarmerie, mais c’est égal, il est troppuni !
La sous-intendante rêvait à cette pochepercée.
Il y avait alors des petites pièces de cinqsous. Elle se disait :
– Si sa pension lui est payée en argent,je ferais bien une promenade de quatre ou cinq heures derrière leJuif-Errant.
– Mais l’histoire, demanda-t-on de touscôtés, la fameuse histoire !
– L’histoire du colonel et de lacomtesse !
– Le Juif-Errant à Lamballe !
– Comment Mme Louise deSavray eut ses deux cent mille livres de rentes !
– L’histoire, madame Lancelot,l’histoire !
Mme Lancelot venait de faireson entrée. Quoique les Domaines soient une belle carrière, elle nedînait pas et n’avait droit qu’à la soirée.
Vous connaissez la figure de celles qui nepénètrent ainsi qu’après le dessert.
Au moment où Mme Lancelot desDomaines, dûment sollicitée, allait prendre la parole, Arthursortit de la salle de jeu, ayant à son bras la comtesse Louise.
Il avait perdu mille louis contre le colonelcomte Roland de Savray.