La Fille du Juif-Errant

Chapitre 8LES AVENTURES DE L’ONCLE HENRI

Derrière la porte du cabinet l’étranger étaitdebout en face de M. Lemercier, à qui il avait dit :« Regardez-moi ».

Les jambes de M. Lemercier tremblèrentsous le poids de son corps.

L’étranger le saisit dans ses bras au momentoù il allait tomber à la renverse, en balbutiant cesmots :

– Mon fils Henri ! mon filsHenri !

Jeanne essaya de se lever, mais l’émotion latenait clouée à son siége.

Le colonel Américain Henri Lemercier dufaubourg Poissonnière, puisque nous savons désormais son vrai nom,riait et pleurait à la fois.

– Père ! s’écria-t-il en levant levieillard dans ses bras, père bien-aimé, mepardonneras-tu ?

– Ta mère… murmura le vieillard, je vaischercher ta mère…

– Pas encore ! il faut lapréparer…

– C’est juste, dit M. Lemercier,doux comme un enfant. Je perds la tête, vois-tu… Est-il possible,mon Dieu ! Henri ! mon fils Henri ! Un colonel desÉtats-Unis !… est-ce pour le carnaval ?

– Non, c’est pour tout de bon, père,répondit gaiement le colonel ; mais nous sommes quatre, tusais : ma femme et mes deux chéris.

– Tes enfants ! mes enfants !s’écria le vieillard ; ta femme… ma fille !

Il tendit les bras. Jeanne s’y précipita,muette de bonheur.

Pendant une minute, ils ne parlèrent plus.M. Lemercier reprit :

– Ta mère, Henri… ma femme…

– Oh ! c’est la bonne bouche, cela,père, s’écria le colonel. Je t’aime dix fois plus que ma vie ;mais, tu n’es pas jaloux, n’est-ce pas ? Ma mère ! masainte et bien-aimée mère !… Il faut attendre… la préparerpetit à petit… Comment trouves-tu ta fille, père ?

M. Lemercier ne répondit qu’en pressantJeanne contre son cœur.

– Comme ses sœurs vont l’aimer !pensa-t-il tout haut.

– Mes excellentes sœurs ! Père, jen’ai pas été un seul jour sans penser à vous tous. Mais regarde-moidonc ! Est-ce que je ressemble encore au portrait qui est surla boîte d’écaille de maman ?

– Tu ressembles à un brigand, répondit levieillard en souriant à travers ses larmes. Que va dire ton onclele curé ?… Mais comment se fait-il, expliquez-moi donc cela,mes enfants, comment se fait-il que ma belle Jeanne… mafille !… ne m’ait pas dit un mot de tout cela depuis deux ansqu’elle vit à dix pas de moi ?

– Elle eût été bien embarrassée, père.Elle a su mon nom seulement quand elle t’a entendu m’appeler« mon fils. »

– Vraiment !

Un nuage vint au front du brave négociant.

– Oh ! sois tranquille, père, noussommes mariés : par un prêtre hongrois.

– Sont-ce de vrais prêtres ? demandaM. Lemercier.

– Je crois bien ! La cathédrale deGran est la métropole de toute l’Autriche !

– Et tu as ton acte de mariage ?

– Nous le ferons venir. Jeanne s’estcruellement mésalliée en épousant le fils d’un commerçant, je tepréviens de cela, père. M. Jacoby est palatin hongrois.

– Ah ! ah ! palatin… Il faut,me pardonner, ma fille, je ne sais pas du tout ce que c’est qu’unpalatin.

– C’est quelque chose comme un demi-centde sénateurs.

– Vraiment ! Ah çà ! c’est doncun roman que ton histoire ?

– Un vrai roman ! Asseyez-vous làtous les deux, car Jeanne n’en sait pas beaucoup plus long que toi,père. Je vous raconterai les détails une autre fois, aujourd’hui,je vais vous dire le gros. M. Lemercier, tout sage que vousêtes, vous avez donné le jour à un grand fou, et, quand je regardeen arrière, je me demande où j’ai pu prendre tant d’idéesextravagantes. Ceci est le préambule. M’écoutez-vous ?

Le vieillard et la jeune femme étaient assiset se tenaient par la main.

– Nous t’écoutons, dirent-ils.

– Et moi aussi, prononça une voix pleinede larmes de l’autre côté de la porte.

Henri ne fit qu’un bond et rapporta sa mèredans ses bras.

Jane, mon ange, voilà ce que je ne saurais paste peindre. Nul n’a pu trouver encore le fond d’un cœur de mère. Cefurent des baisers, des étreintes, des pleurs.Mme Lemercier voulait être toute à son fils et nepouvait se lasser d’admirer sa nouvelle fille. Elle voulait envoyerchercher les deux enfants pour les voir ; elle voulait aussises quatre filles et tous ses autres petits-enfants pour leur fairevoir. Elle riait, elle sanglotait, elle avait le délire.

– Que tout le monde écoute ! ordonnaHenri, qui était le maître. Il est permis de rire, de pleurer, des’embrasser ; mais je dois une histoire, je la paye. Tant pispour ceux qui s’occuperont à autre chose. J’ai deux jours detraversée et quarante heures de chemin de fer dans le corps. Ilfaudra bien que je dorme, à la fin. Y est-on ?

– Nous y sommes.

– Me voilà donc parti pour chercher desaventures. Dix huit ans, et ne sachant à quelles bagarres me vouer.Je ne comprends pas beaucoup la politique. Il me fallait me battre,n’importe pour qui ; telle était ma vocation. Je ne m’en vantepas. Je pense qu’elle est la punition de tous les bordereaux qui sesont faits depuis cinquante ans dans la maison de papa. Le commercea couvé ici un œuf de bandit. Avançons.

» Au lieu de garder le roi de Naples,dont le fils s’est crânement conduit à Gaële, je tirai d’abord descoups de fusil aux Russes et aux Autrichiens, tout le long duDanube. Je fus blessé, parce que j’allais au combat comme à lanoce, et au mois de juin 1848, le père de Jeanne me recueillit enson château de Kaunitz, près de Debreckzin. Jeanne me soigna et jel’aimai. C’est la règle. Je m’appelais le capitaine Henri, toutuniment, par la crainte que j’avais d’inquiéter ma bonne mère, quiaurait vu mon nom dans les journaux. Le palatin Jacoby, fier commeGuzman, n’aurait pas plus donné sa fille, du reste, à M. HenriLemercier qu’au capitaine Henri. Nous nous mariâmes. Je rejoignisl’armée ; je fus fait prisonnier par les Russes, et, depuislors, je n’ai revu ma femme que cette nuit, dans la cour de notrehôtel, ici, faubourg Poissonnière, à Paris.

» Je m’échappai du château de Szegedin,où l’on gardait les captifs ; je tuai en duel un magnathongrois, qui était un excellent seigneur, mais que le palatinJacoby voulait avoir pour gendre. Les Magyars se mirent à mepoursuivre comme un chien enragé ; je me rendis aux Russes.J’eus dispute avec un colonel d’artillerie, qui était bien le plusgalant homme que j’aie rencontré jamais. Il avait dit du mal devotre gouvernement provisoire de 1848, et il avait bien raison,mais je n’en savais pas plus long, et ce bêta de gouvernement,c’était la France, pour le moment. Nous allâmes sur le pré, lecolonel et moi ; il y resta. Je fus envoyé tout net enSibérie.

» Il y a du bon partout, même enSibérie ; seulement on n’y peut pas écrire à ses parents. Jefus employé à faire de l’or, et Dieu sait que la Californie n’estque de la Saint-Jean auprès de ces riches placers perdus sous laneige. Je m’ennuyais, je me sauvai ; je fus repris, je mesauvai encore. Cela m’occupait. Je voyais toujours ma mère et mafemme ; j’aurais brisé des murs de diamant.

» Les évasions sont rares en Sibérie. Unjour j’entendis parler de la guerre de Crimée. Les Russes sont debons enfants qui aiment beaucoup les Français. Ils me racontèrentles exploits de l’armée française dans la Baltique et dans la merNoire. Vive Dieu ! me disaient-ils, si les Anglais ne vousavaient pas, comme nous les rosserions ! Mais il est écrit quel’Angleterre trouvera toujours moyen de s’abriter derrière lavaillance française sans jamais lui rendre la pareille. Cela m’estbien égal. Je n’aime pas beaucoup les Anglais ; mais il fautque tout le monde vive.

» Le soir du jour où il me fut parlé dela tour Malakoff, je sautai en bas d’un rempart de quarante pieds,j’en escaladai un autre de même taille, et je fis douze lieues dansla neige. J’allais à Sébastopol. Des monts Altaï, où j’étais,jusqu’à la Crimée, il y a loin ; n’importe, j’étais lancé.J’avais un costume russe je savais la langue :marche !

» Je marchai. J’arrivai à Sébastopoljuste une année après la prise de Malakoff.

» J’écrivis à ma femme en lui disant monnom, cette fois, et en la priant de donner de mes nouvelles à mabonne mère. La lettre doit être à la poste de Gran ; nousl’irons chercher quelque matin.

» J’étais libre, morbleu ! etc’était bien le principal. J’atteignis la frontière turque comme jepus. Me voilà chez des alliés. Vive la France !

» Je ne connais rien en politique ;mais s’il fallait juger la France par ses alliés ottomans,miséricorde ! On parle des Russes ! mais les Russes sontdes chérubins auprès de ces magots de Turquie, stupides, cruels,voleurs, menteurs, assassins et poltrons. Il y a pourtant de bravesgens parmi eux, seulement, ils sont trop rares.

» Enfin, n’importe ! Je m’embarquaien qualité de matelot sur une grande coquine de felouque mal faite,mal gréée, mal voilée et, surtout mal fréquentée, qui portaitquelques marchandises moisies. Nous fîmes voile de Sinope pour lesîles de l’Archipel. Le commandant du navire me donna trois fois descoups de bâton. Il les donnait très-bien. Je les lui rendis àLemnos, localité célèbre au collége. Je lui cassai les deux bras,les deux jambes et la tête. L’équipage voulut me nommerpacha ; mais on parlait d’une campagne que la France devaitfaire en Italie, j’avais hâte d’arriver.

» J’arrivai le lendemain de la paix deVillafranca. Est-ce du guignon ? Heureusement, j’étais àVenise. Je fis connaissance avec une douzaine d’officiersautrichiens, gais compagnons, doux comme des agneaux et bravescomme des lions. Les journaux, je vous en préviens vous en fontavaler de bien fortes au sujet des étrangers. Tout en fréquentantmes Autrichiens, je rencontrai un honnête garçon qui conspiraitcontre l’Autriche. Je fis de tendres adieux à mes habits blancsd’Autrichiens et je m’embarquai pour Gênes. De Gênes, je passaivolontaire en Sicile. J’y restai peu : j’aime la guerre, c’estvrai, mais non pas celle-là, et dès que j’eus regardé de prèsGaribaldi, l’idée me vint de me faire zouave du pape : à labonne heure ; ceux-là sont des soldats ! Seulement, surla route, en passant le détroit, je rencontrai Godard ;Godard, de la rue des Petites-Écuries, qui est contre-Amiral dansla flotte d’Alexandre Dumas. Il me donna des nouvelles de ma mère,de mon bon père, de mes chères sœurs, de tous les petits enfants…Il paraît que nous fondons un clan, ici, dites donc, comme dans lesromans de Walter Scott ?…

» Godard n’est pas beau ; mais savue me fit verser des larmes. C’était la patrie ; bien plusque la patrie, c’était le faubourg Poissonnière. À son aspect, toutle boulevard Bonne-Nouvelle passa devant mes yeux éblouis. Je visle Gymmase, le Bazar, la porte Saint-Denis… Oh ! la porteSaint-Denis ! Je remontai le faubourg par la pensée j’aperçusle Conservatoire, le Garde-Meuble et la chère porte de notremaison.

» Ma mère, ma pauvre bonne mère, j’auraispassé en ce moment la Méditerranée à la nage pour venir me jeterdans tes bras. Je me bouchai les deux oreilles pour ne pas entendrele bruit héroïque du canon de Gaëte, et je sautai sur le pont dubateau à vapeur.

» Vous croyez peut-être que c’esttout ! Hélas ; non. Je ne sais comment ce diable de majorSmith m’embaucha. Il était à Marseille, le major Smith, fabricantde cuir de coton, et il embarquait des soldats pour New-York. Laguerre d’Amérique, hein ? Comment résister à cela ! Jepartis pour renforcer l’armée fédérale ; mais heureusement jeme trompai de chemin, et j’ai passé six mois dans les rangs deshommes du Sud, qui ont eu l’obligeance de me nommer colonel. Quelsgaillards ! Savez-vous pourquoi ils se hachent, là-bas ?Non ? ni moi non plus. Un bandagiste, qui commandait mon corpsd’armée, et qui battait sa femme parce qu’elle mettait de l’eaudans son rhum, me tira un matin quatre coups de revolver ; onn’a jamais pu deviner pourquoi. Je me fâchai, je lebrutalisai ; il en mourut. On voulut me pendre, ce n’était pasmon opinion, je pris la clé des champs.

» Un brick français était enpartance ; il se nommaitle Parisien :embarque !

» Je dis au capitaine :« Toujours tout droit jusqu’au faubourgPoissonnière ! »

» Et voilà ! Le bon Dieu, qui apitié des fous comme des ivrognes, voulait me faire une surprise àmon arrivée à Paris et rassembler en un gros bouquet tous mes chersamours pour fêter mon retour dans ma patrie. Je comptais courir enAutriche, après avoir embrassé mes parents ; je retrouve ici,non seulement tous ceux que j’y ai laissés, mais ma femme, montrésor de femme, mes enfants, aussi. Je raille pour garder unecontenance, mais j’ai envie de pleurer… Je pleure… je suis heureux,je vous aime… embrassez-moi !

Ses larmes inondèrent, en effet, son mâlevisage. Paris produit de ces aventuriers qui sont bons comme dupain et qui font pis que pendre. On l’embrassa ; sa figurehâlée et tout humide de pleurs n’était pas assez large pour tousles baisers qu’on y mettait à la fois.

Ceux qui l’entouraient et lui-même étaienttrop occupés pour remarquer cela ; mais, depuis quelquesminutes, un bruit confus se faisait entendre dans le corridor.C’étaient des piétinements, des rires, des murmures et deschuchotements. Tout cela se taisait quand on cessait de parler dansle cabinet.

– Et maintenant, fils, ditMr Lemercier d’un ton suppliant, c’est bien fini, n’est-cepas ?

– Bien fini, répéta le grand-père, tunous as fait assez de chagrin.

– Dis, Henri, implora la jeune femme,réponds à ton père et à ta mère, tu ne nous quitterasplus ?

L’oncle Henri hésita un instant. Il regardason uniforme, mais il regarda aussi les beaux yeux de Jeanne.

– Ma foi, dit-il, j’ai trente ans, c’estl’âge de se ranger. On a beau dire, les aventures sont fatigantes,et, sans parler de la Russie j’ai passé des instants biendésagréables, tant avec nos alliés les Turcs que chez les héros duPotomac. J’avais bien songé à faire une pointe jusqu’en Pologne,mais on y parle latin et c’est le chemin de la Sibérie. Réflexionfaite, à bas la guerre ! vive la famille ! je me faismarguillier de la paroisse Saint-Eugène, adjoint au maire ousergent-major de la garde nationale, au choix du gouvernement.Soupe-t-on ? Si c’est encore l’habitude de ces contrées, jemangerai une tranche de foie gras avec plaisir… La main auxdames !

Il saisit à la fois sa mère et Jeanne et lesentraîna ravies vers la porte.

Au moment où il l’ouvrait, un fracasépouvantable éclata, et la maison trembla sous la frénésie desapplaudissements qui grondèrent dans les corridors.

– En triomphe ! l’oncle Henri !en triomphe ! criaient cinq cents voix enthousiastes dont letimbre généralement suraigu donnait plus de montant à cettemanifestation. Vive l’oncle Henri qui a été en Sibérie ! Vivel’oncle Henri qui a pris la tour Malakoff un an après le maréchalPélissier ! Vive l’oncle Henri qui a cassé un Turc comme unepoupée ! Vive l’oncle Henri qui se battait sans savoirpourquoi ! Colonel ! adjoint ! sergent-major !propriétaire ! et marguillier ! Vive l’oncle Henri quiest revenu ! Vive sa femme ! vivent ses enfants !vive le souper ! En triomphe ! en triomphe !

Les monstres avaient écouté, Jane ; lesmonstres avaient entendu ! Penses-tu qu’ils respectaient lehéros de tant de belles aventures ? Du tout ! ils sependaient à sa tunique comme la trop nombreuse famille de la mèreGigogne s’accroche à ses jupons. Ils voulaient tous en avoir unmorceau pour en faire sans doute des reliques. Oh ! certes,l’oncle Henri avait couru de bien grands dangers en sa vie, maisjamais il ne s’était trouvé à pareille mêlée.

Figure-toi cinq cents diables acharnés contreun aventurier paisible ! Il ne savait auquel entendre etdemandait grâce en riant aux larmes.

– Où sont mes neveux ? où sont mesnièces ?

– Moi, moi, moi !

Tous ! figure-toi Jane ! Ils étaienttous ses nièces et ses neveux. Maurice, qui était monté sur sesépaules par derrière, avait beau l’étouffer, il ne pouvait se faireentendre. Maurice voulait désigner loyalement les vraies nièces etles vrais neveux, mais, bah ! Je t’en souhaite !

– Moi, moi, moi !

– Mon oncle, ne reconnais-tu pas tonpetit Augustin ? criait un scélérat de mandarin, jaune commeun serin.

– Mon oncle, mon bon oncle, ne fais paslanguir ta petite Célestine ! roucoulait une Albanaise.

– Ah ! mon oncle ! pleuraitArlequin, je suis ton Casimir ! Comme tu m’aurais fait sautersur tes genoux si j’avais été au monde avant ton départ !

– Embrasse Gustave, mon oncle !

– Mon oncle ! une caresse àSidonie !

– N’as-tu rien rapporté pourAglaé ?

– Pas un souvenir à Clémence !

– Mon oncle ! mon oncle ! mononcle !

Deux cent cinquante nièces ! deux centcinquante neveux ! L’oncle Henri devenait fou comme un chevaltourmenté par les mouches. Il cherchait de bonne foi les fils etles filles de ses sœurs ; il tâchait de les distinguer par laressemblance, mais son regard se noyait dans cet océan de visagesjoyeux et moqueurs. Il ne reconnaissait plus ses propres enfants,qu’il n’avait vus qu’une seule fois, il était perdu, débordé,submergé ; un rire homérique le prenait.

– Je demande à retourner enMerrimaquie ! s’écria-t-il, capitulant franchement ; mesneveux et mes nièces, ayez pitié de moi ! Je merends !

Ainsi parla ce libérateur de l’Italie etautres nationalités. Les assiégeants cessèrent aussitôt le feu, caril avait affaire à de généreux ennemis, et M. Lemerciercommençait à faire les gros yeux. Une délicieuse Marie Stuart et unbeau highlander sortirent des rangs et s’élancèrent dans ses brasen l’appelant papa. On ne riait plus. Henri et Henriette luiprésentèrent Gaston ; Maurice, Fernand ; Claire,Antonine, Louise, Agathe et les autres, tandis que les jeunes mèresattendaient leur tour pour le presser dans leurs bras, après avoircomblé déjà de caresses leur nouvelle sœur.

À table, maintenant ! Dans le jardind’hiver ! Un festin de Balthasar !

Vertu-chou, Jane ! comme on soupa !Il y en avait pour tout le monde. L’orchestre soupait, et sais-tuce que peut manger un trombone qui soupe ? Les domestiquessoupaient ; la concierge soupait, les pompiers soupaient.Ah ! qu’il est doux de voir un souper de pompier !Maurice alla trinquer avec eux.

Six heures du matin sonnant, les cuivres,vaillamment embouchés, sonnèrent comme une fanfare en forêt.C’était le galop final. Maurice avait Henriette ; la petiteAgathe s’était emparée d’Henri. L’oncle était la proie de Claire,d’Antonin, de Louise et d’une douzaine d’autres tyrans mignons. Legrand-papa ?… oui, Jane ! le grand-papa en était ;il avait pris sa nouvelle fille par la taille et galopait comme unperdu : la grand’maman galopait, tenue aux deux anses, commeun panier, par deux de ses gendres ; les quatre jeunes mèresgalopaient, tout le monde, quoi ! C’était un galop magnifique,imposant, monumental :

Quand il fut fini, on tira l’échelle.

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