Commentaire.
Il ne faut pas chercher de philosophie dansles poésies d’un jeune homme de vingt ans. Cette méditation en estune preuve de plus. La poésie pense peu, à cet âge surtout ;elle peint et elle chante. Cette méditation est une larme sur lepassé. Je venais de lire le Génie du Christianisme, de M.de Chateaubriand ; j’étais fanatisé des images dont ce livre,illustration de toutes les belles ruines, était étincelant. J’étaisde l’opinion de René, de la religion d’Atala, de la foi du P.Aubry. De plus, j’avais eu toujours une indicible horreur dumatérialisme, ce squelette de la création, exposé endérision aux yeux de l’homme par des algébristes sur l’autel dunéant, à la place de Dieu. Ces hommes me paraissaient et meparaissent encore aujourd’hui des aveugles-nés, des Œdipesdu genre humain, niant l’énigme de Dieu parce qu’ils ne peuvent pasla déchiffrer. Enfin, j’étais né d’une famille royaliste qui avaitgémi plus qu’aucune autre sur la chute du trône, sur la mort duvertueux et malheureux roi, sur les crimes de l’anarchie. J’eus unaccès d’admiration pour tous les passés, une imprécation contretous les démolisseurs des vieilles choses. Cet accès produisit cesvers et quelques autres : il ne fut pas très long. Il setransforma par la réflexion en appréciation équitable des vices etdes avantages propres à chaque nature de gouvernement, et enspiritualisme religieux plein de vénération pour toutes les foissincères, et plein d’aspiration pour le rayonnement toujourscroissant du nom divin sur la raison de l’homme.