XXXV – L’AUTOMNE.
Salut, bois couronnés d’un reste deverdure !
Feuillages jaunissants sur les gazonsépars ;
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil dela nature
Convient à la douleur et plaît à mesregards.
Je suis d’un pas rêveur le sentiersolitaire ;
J’aime à revoir encor, pour la dernièrefois,
Ce soleil pâlissant, dont la faiblelumière
Perce à peine à mes pieds l’obscurité desbois.
Oui, dans ces jours d’automne où la natureexpire,
À ses regards voilés, je trouve plusd’attraits ;
C’est l’adieu d’un ami, c’est le derniersourire
Des lèvres que la mort va fermer pourjamais.
Ainsi, prêt à quitter l’horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l’espoirévanoui,
Je me retourne encore, et d’un regardd’envie
Je contemple ces biens dont je n’ai pasjoui.
Terre, soleil, vallons, belle et doucenature,
Je vous dois une larme aux bords de montombeau !
L’air est si parfumé ! la lumière est sipure !
Aux regards d’un mourant le soleil est sibeau !
Je voudrais maintenant vider jusqu’à lalie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel :
Au fond de cette coupe où je buvais lavie,
Peut-être restait-il une goutte demiel !
Peut-être l’avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l’espoir estperdu !
Peut-être, dans la foule, une âme quej’ignore
Aurait compris mon âme, et m’auraitrépondu !…
La fleur tombe en livrant ses parfums auzéphire ;
À la vie, au soleil, ce sont là sesadieux ;
Moi, je meurs ; et mon âme, au momentqu’elle expire,
S’exhale comme un son triste et mélodieux.