Rocambole – En prison

Chapitre 35

 

 

Le boyau souterrain dans lequel Marmouset etMilon s’étaient engagés était creusé à même le sol, comme ondit.

C’est-à-dire que ceux qui l’avaient pratiquén’avaient pas perdu leur temps à édifier des voûtes enmaçonnerie ; aussi, au bout de vingt pas, nos deuxexplorateurs furent-ils arrêtés par un éboulement qui s’étaitproduit à une époque difficile à déterminer.

– Hé ! dit Marmouset, nous noussommes vantés trop tôt. Nous aurons besoin de la pioche et de lapelle.

Ils rebroussèrent chemin et vinrent dans lapremière cave chercher les outils, que Milon y avait entassés.

Puis ils retournèrent attaquerl’éboulement.

Il était peu considérable, du reste, et enquelques coups de pioche la solution de continuité fut détruite etils se frayèrent un nouveau passage.

Cent pas plus loin, ils trouvèrent une porteen tout semblable à la première.

Marmouset l’ouvrit par le même procédé qu’ilavait vu employer au serrurier et qu’il avait employé déjà.

La porte ouverte, ils se trouvèrent, non plusà l’entrée d’une galerie unique, mais au seuil d’une sorte depetite salle circulaire.

On avait étayé les terres avec une grossièrecharpente, et le sol boueux annonçait que des infiltrationsnombreuses se produisaient en cet endroit.

Trois galeries venaient aboutir à cettesalle.

– Ah ! diable ! dit Milon, nousvoici plus embarrassés que jamais. Laquelle prendre ?

– Voyons le plan, répondit Marmouset.

Et il étala le plan sur ses genoux, aprèss’être accroupi sur le sol, et Milon se pencha auprès de lui lachandelle à la main.

Le plan n’indiquait pas cette bifurcation.

Marmouset parut réfléchir un moment.

Puis, regardant Milon :

– Nous sommes venus en droite lignejusqu’ici n’est-ce pas ?

– Je le crois.

– Eh bien ! suivons la galerie dumilieu.

– Pourquoi ?

– Parce que pour aller dans Newgate, nousdevons traverser Old-Bailey.

– C’est juste.

Ils se remirent en marche ; mais au boutde quelques pas, un nouvel éboulement les arrêta.

Cette fois, après quelques coups de pioche,Marmouset se retourna vers son compagnon :

– Il y a là, dit-il, un travail deplusieurs heures.

– Ah ! fit Milon, alors…

– Alors nous allons appeler nos amis.

– Tout de suite ?

– Non.

Marmouset consulta sa montre.

– Il est quatre heures, dit-il.

– Eh bien ?

– Dans deux heures il fera nuit et laCité, si encombrée en ce moment, sera déserte.

– Bon !

– Les boutiques ferment de bonne heure,tu fermeras la tienne, et nous aurons tout le loisir de travaillerà notre aise.

Puis, se grattant l’oreille :

– Mais pourquoi n’explorons-nous pas,dit-il, les autres galeries ?

– Comme tu voudras. Seulement il estprobable que nous serons arrêtés pas les mêmes obstacles.

Ils revinrent dans la petite salle circulaireet prirent alors la galerie qui paraissait infléchir à droite.

– Oh ! oh ! murmura Marmousetqui marchait toujours le premier, qu’est-ce que cela ?

Et il s’arrêta.

– Qu’est-ce ? demanda Milon.

– N’entends-tu pas une sorte de bruitsourd et continu ?

Milon prêta l’oreille.

– Bah ! dit-il, c’est le roulementdes voitures qui passent au-dessus de nous.

– Je ne crois pas…

Et Marmouset, rendant la chandelle à Milon, secoucha à plat ventre et appuya son oreille contre le sol.

Puis, se relevant :

– Je ne crois pas que ce soit leroulement des voitures, dit-il.

Mais avançons toujours ; nous verronsbien.

Au bout de trente pas encore, ils’arrêta :

– Ne remarques-tu pas que le sols’abaisse toujours un peu devant nous ?

– Mais c’est vrai, dit Milon, nous sommessur une pente.

– Ce qui justifie mon opinion.

– Ah !

– La Cité est sur une colline, n’est-cepas ?

– Sans doute.

– Toutes les eaux qui vont à la Tamisesuivent par conséquent une déclivité plus ou moinsgrande ?

– Naturellement, dit Milon.

– Eh bien ! sais-tu quel est cebruit que nous entendons et qui devient plus perceptible à mesureque nous approchons ?

– Non.

– C’est la Tamise, à laquelle cesouterrain aboutit.

– Oh ! par exemple !

– Avançons toujours, tu verras…

La pente devenait de plus en plus rapide et lebruit plus strident.

Bientôt il ressembla à un roulement detonnerre.

Tout à coup la flamme de la chandellevacilla.

– Tiens, vois-tu ? ditMarmouset.

– Quoi donc ?

– Un courant d’air.

Et il abrita la chandelle avec une de sesmains.

– Il y a des courants d’air partout, ditencore Milon.

– Soit, mais celui qui nous frappe auvisage est un air frais et qui vient du dehors.

– Alors, puisque nous voilà fixés,rebroussons chemin.

– Du tout.

– Pourquoi donc ?

– J’ai mon idée, dit Marmouset, je veuxsavoir où aboutit le souterrain.

– À la Tamise, comme vous voyez, et noustournons le dos à notre but.

– Imbécile ! dit Marmouset.

– Plaît-il ?

– Supposons que nous ayons délivréRocambole.

– Nous n’avons plus besoin dusouterrain.

– Au contraire, nous lui faisons faire cechemin-ci et nous le menons tout droit à la Tamise, où une barquenous attend.

– Tiens, c’est vrai, dit Milon.

Et ils avancèrent encore.

Mais soudain le courant d’air fut si violentque la chandelle s’éteignit…

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer