XXI. – À Paul M.
Auteur du drame Paris
Tu graves au fronton sévère de ton œuvre
Un nom proscrit que mord en sifflant lacouleuvre ;
Au malheur, dont le flanc saigne et dont l’œilsourit, noire
À la proscription, et non pas au proscrit,
– Car le proscrit n’est rien que del’ombre, moins
Que l’autre ombre qu’on nomme éclat, bonheur,victoire ; –
À l’exil pâle et nu, cloué sur des débris,
Tu donnes ton grand drame où vit le grandParis,
Cette cité de feu, de nuit, d’airain, deverre,
Et tu fais saluer par Rome le Calvaire.
Sois loué, doux penseur, toi qui prends dansta main
Le passé, l’avenir, tout le progrèshumain,
La lumière, l’histoire, et la ville, et laFrance,
Tous les dictames saints qui calment lasouffrance,
Raison, justice, espoir, vertu, foi,vérité,
Le parfum poésie et le vin liberté,
Et qui sur le vaincu, cœur meurtri, noirfantôme,
Te penches, et répands l’idéal comme unbaume !
Paul, il me semble, grâce à ce fiersouvenir
Dont tu viens nous bercer, nous sacrer, nousbénir,
Que dans ma plaie, où dort la douleur, ôpoëte !
Je sens de la charpie avec un drapeaufaite.
Marine-Terrace, août 1855.