Les Contemplations

II. – Au fils d’un poëte

 

Enfant, laisse aux mers inquiètes

Le naufragé, tribun ou roi ;

Laisse s’en aller les poëtes !

La poésie est près de toi.

Elle t’échauffe, elle t’inspire,

Ô cher enfant, doux alcyon,

Car ta mère en est le sourire,

Et ton père en est le rayon.

Les yeux en pleurs, tu me demandes

Où je vais, et pourquoi je pars.

Je n’en sais rien ; les mers sontgrandes ;

L’exil s’ouvre de toutes parts.

Ce que Dieu nous donne, il nous l’ôte.

Adieu, patrie ! adieu, Sion !

Le proscrit n’est pas même un hôte,

Enfant, c’est une vision.

Il entre, il s’assied, puis se lève,

Reprend son bâton et s’en va.

Sa vie erre de grève en grève

Sous le souffle de Jéhovah.

Il fuit sur les vagues profondes,

Sans repos, toujours en avant.

Qu’importe ce qu’en font les ondes !

Qu’importe ce qu’en fait le vent !

Garde, enfant, dans ta jeune tête

Ce souvenir mystérieux,

Tu l’as vu dans une tempête

Passer comme l’éclair des cieux.

Son âme aux chocs habituée

Traversait l’orage et le bruit.

D’où sortait-il ? De la nuée.

Où s’enfonçait-il ? Dans la nuit.

Bruxelles, juillet 1852.

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