Les Contemplations

XII. – Vere novo

 

Comme le matin rit sur les roses enpleurs !

Oh ! les charmants petits amoureux qu’ontles fleurs !

Ce n’est dans les jasmins, ce n’est dans lespervenches

Qu’un éblouissement de folles ailesblanches

Qui vont, viennent, s’en vont, reviennent, sefermant,

Se rouvrant, dans un vaste et douxfrémissement.

Ô printemps ! quand on songe à toutes lesmissives

Qui des amants rêveurs vont aux bellespensives,

À ces cœurs confiés au papier, à ce tas

De lettres que le feutre écrit autaffetas,

Aux messages d’amour, d’ivresse et dedélire

Qu’on reçoit en avril et qu’en mai l’ondéchire,

On croit voir s’envoler, au gré du ventjoyeux,

Dans les prés, dans les bois, sur les eaux,dans les cieux,

Et rôder en tous lieux, cherchant partout uneâme,

Et courir à la fleur en sortant de lafemme,

Les petits morceaux blancs, chassés entourbillons,

De tous les billets doux, devenuspapillons.

Mai1831.

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