XVI
Je traversais hier au soir Stamboul à cheval,pour aller chez Izeddin-Ali. C’était la grande fête du Baïram,grande féerie orientale, dernier tableau du Ramazan : toutesles mosquées illuminées ; les minarets étincelants jusqu’àleur extrême pointe ; des versets du Koran en lettreslumineuses suspendus dans l’air ; des milliers d’hommes criantà la fois, au bruit du canon, le nom vénéré d’Allah ; unefoule en habits de fête, promenant dans les rues des profusions defeux et de lanternes ; des femmes voilées circulant partroupes, vêtues de soie, d’argent et d’or.
Après avoir couru, Izeddin-Ali et moi, toutStamboul, à trois heures du matin nous terminions nos explorationspar un souterrain de banlieue, où de jeunes garçons asiatiques,costumés en almées, exécutaient des danses lascives devant unpublic composé de tous les repris de la justice ottomane, saturnaled’une écœurante nouveauté. Je demandai grâce pour la fin de cespectacle, digne des beaux moments de Sodome, et nous rentrâmes aupetit jour.